Biodiversité

Le phytoplancton dans les eaux littorales métropolitaines de 2007 à 2012

Mis à jour le | Commissariat général au développement durable

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Le phytoplancton est à la base des chaines alimentaires en domaine marin. Les développements importants de phytoplancton (bloom) se produisent souvent au débouché des fleuves ou dans les lagunes. Les données sur le phytoplancton contribuent à évaluer la qualité des masses d’eau côtières dans le cadre de la Directive-cadre sur l’Eau. Entre 2007 et 2012, 300 blooms par an ont été recensés. Les diatomées sont responsables de la majorité des blooms sur l’ensemble du littoral français.

Analyse générale

Le nombre de proliférations importantes de phytoplancton (blooms) est assez variable d’une année à l’autre à l’intérieur d’une même façade, mais reste dans les mêmes ordres de grandeur.

Les espèces appartenant aux diatomées (Bacillariophyta) sont responsables de la majorité des blooms sur l’ensemble du littoral français, trois quarts des épisodes. Elles prolifèrent surtout en fin de printemps en bénéficiant d’apports importants de nutriments, après les pluies hivernales.

D’autres espèces non siliceuses, les dinoflagellés (Dinophyceae) et les espèces des autres groupes, se partagent la deuxième position, selon la façade et le mois considérés. Ces proliférations modifient l’équilibre de la flore au détriment des diatomées, espèces essentielles des chaines alimentaires marines.

Les quatre taxons (nom générique pour désigner une espèce ou un groupe d’espèces) dominants au niveau national sont Pseudo-nitzschia, Chaetoceros, Skeletonema costatum et Cryptophyceae dont les Cryptomonadales. Les trois premiers sont des diatomées. Ils sont également les plus dominants dans chacune des trois façades maritimes, confortant leur rôle ubiquiste sur le littoral français.

Les données sur le phytoplancton contribuent à évaluer la qualité des masses d’eau côtières dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau. Une évaluation réalisée sur la période 2007-2012 montre que la qualité des masses d’eau littorales métropolitaines est globalement bonne pour l’élément « phytoplancton », puisque 95 masses d’eau sur les 116 masses d’eau évaluées, soit 82 %, sont jugées en bon ou en très bon état.

L’analyse des données sur les trois principaux taxons phytoplanctoniques toxiques, conduisant à des contaminations récurrentes des coquillages, révèle des schémas très différents concernant leur répartition spatiale et temporelle, et les
concentrations maximales observées.

Principales caractéristiques des données acquises sur le phytoplancton marin du littoral métropolitain
Illustration 1489
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Note : un résultat correspond au dénombrement d’un taxon unique. Un échantillon d’eau comprenant plusieurs taxons, il y autant de résultats que de taxons.

Entre 2007 et 2012, en moyenne, 300 blooms par an (cumul annuel des occurrences mensuelles des blooms) on été recensés sans que l’on puisse déterminer de tendance d’évolution.

Les blooms avec une concentration cellulaire supérieure à un million de cellules par litre représentent un quart du total, en moyenne, sur la période étudiée.

Nombre de blooms par an (cumuls annuels des occurrences mensuelles de blooms) dans les eaux littorales métropolitaines
Illustration 1490
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Pour chacune des façades, le nombre de blooms est assez variable d’une année à l’autre. Il reste cependant dans les mêmes ordres de grandeur, sans tendance visible à cette échelle temporelle. La diminution apparente du nombre de blooms depuis 2009 sur la façade Manche - mer du Nord est très probablement liée au nombre important de blooms recensés en 2009 et 2010. Dans la mesure où l’effort d’échantillonnage n’est pas identique d’une façade à l’autre, on ne peut pas comparer les résultats entre façades.

Répartition par façade et par année des blooms dans les eaux littorales métropolitaines
Illustration 1491
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Évolution saisonnière des blooms

Les figures ci-dessous décrivent les évolutions saisonnières du nombre de blooms, sur la période 2007-2012, en détaillant les trois principaux groupes de phytoplancton : Bacillariophyta (diatomées), Dinophyceae (dinoflagellés), les autres classes (Cryptophyceae, Chlorophyceae, Prymnesiophyceae,...) étant rassemblés dans le groupe « Autres ».

Ces graphiques montrent que les diatomées sont responsables de la majorité des blooms sur l’ensemble du littoral français, environ les trois quarts, quelle que soit la façade étudiée. Les espèces dinoflagellés et les espèces des autres groupes se partagent la deuxième position selon la façade et selon le mois pris en compte.

Nombre de blooms par mois (cumuls mensuels des occurrences de blooms sur la période 2007-2012) sur le littoral métropolitain par façade et groupe d’espèces
Illustration 1493
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De façon générale, les abondances maximales sont observées en fin de printemps. Ce sont surtout des blooms à diatomées, groupe constitué d’espèces avec un squelette siliceux externe et une absence de flagelles. Elles profitent des apports importants de nutriments par les rivières après le lessivage des bassins versants par les pluies hivernales et de l’allongement de la durée du jour favorisant la photosynthèse. Non mobiles, ces espèces sont très dépendantes des apports en nutriments. Elles constituent la base des chaines alimentaires en milieu marin.

Les dinoflagellés sont plus mobiles grâce à leurs flagelles qui leur permettent de se déplacer dans la colonne d’eau. Ces espèces profitent d’une quantité plus limitée de nutriments qui ont été, en grand partie, consommés au printemps lors des blooms à diatomées. Les blooms à dinoflagellés sont donc plus souvent observés durant l’été. Ils modifient l’équilibre de la flore marine au profit d’espèces non siliceuses.

En automne, on peut observer le maintien de blooms, en nombre généralement moins important qu’au printemps, avec de nouveaux apports en nutriments, suite aux pluies automnales.

Enfin la période hivernale est une période de moindre abondance. Quelle que soit la façade étudiée, le mois où le nombre de blooms est le plus faible est le mois de décembre.

La saisonnalité est nettement moins marquée en Méditerranée. Le rapport entre le nombre maximal de blooms par mois et le nombre minimal y est de 2,5. Il est proche de 50 en Manche – mer du Nord et de près de 18 en Atlantique.

Taxons dominants

Pour appréhender la contribution de chacune des espèces aux blooms, et plus généralement savoir quelles sont les espèces les plus présentes dans les populations phytoplanctoniques, il est nécessaire de s’intéresser aux taxons dominants.

La notion de dominance utilisée ici permet de tenir compte de l’importance de chacun des taxons, à la fois en termes de concentration cellulaire, mais aussi de fréquence d’observation dans les échantillons, même si c’est à faible concentration. Une agrégation nationale sur les résultats de ces taxons dominants sur la période 2005-2010 est présentée dans le tableau 2.

Les quatre taxons dominants à l’échelle de l’ensemble du littoral métropolitain sont Pseudo-nitzschia, Chaetoceros, Skeletonema costatum et Cryptophyceae dont les Cryptomonadales. Ils sont également les plus dominants sur chacune des trois façades maritimes. Cela conforte leur rôle ubiquiste sur le littoral français.

Ces taxons sont parfois observés à des concentrations très importantes, parfois supérieures à un million de cellules par litre. Certaines espèces du genre Pseudo-nitzschia sont susceptibles de produire des toxines amnésiantes. Il n’est cependant pas possible, avec les moyens d’observation actuels, de quantifier le pourcentage de leur contribution dans les blooms par rapport à celle des espèces non toxiques.

Certains taxons sont plus particulièrement associés à une ou deux façades, comme Asterionellopsis glacialis (Manche et Atlantique), Phaeocystis et Guinardia (Manche) ou Nitzschia longissima (Méditerranée).

Presque tous ces taxons sont des diatomées, à l’exception notoire de Phaeocystis (classe des Prymnesiophyceae), classé quatrième en Manche dans l’ordre de dominance. Ce taxon prolifère régulièrement de la frontière belge à la baie de Seine. Il est considéré comme nuisible du fait de la formation caractéristique de mousses pouvant conduire à des asphyxies par effet mécanique chez les poissons.

Contribution des données « phytoplancton » à l’évaluation de la qualité des eaux

Les données « phytoplancton » contribuent à évaluer la qualité des masses d’eau littorales dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE), selon un système à cinq classes : état très bon, bon, moyen, médiocre ou mauvais.

Une évaluation a été réalisée sur la période 2007-2012. Elle intègre les résultats obtenus à partir de données « chlorophylle » représentatives de la biomasse du phytoplancton, et de données relatives à la fréquence des blooms qualifiant son abondance. Un indicateur unique a été construit afin de donner une évaluation globale de la qualité des masses d’eaux pour l’élément de qualité « phytoplancton ».

La qualité des masses d’eau littorales est globalement bonne pour cet élément. Plus de 8 masses d’eau sur 10 évaluées, 95 sur 116, sont jugées en bon ou en très bon état.

L’évaluation en état moyen concerne 11 masses d’eau sur littoral du Nord - Pas-de-Calais et de Picardie, à proximité de grands estuaires (sud de la baie de Seine, sortie de la baie de Vilaine en Bretagne sud), et quelques lagunes méditerranéennes.

L’évaluation en état médiocre concerne la baie de Somme et quatre lagunes méditerranéennes.

Enfin, l’évaluation en état mauvais ne concerne que des lagunes méditerranéennes (5 masses d’eau) : trois lagunes du Languedoc-Roussillon, l’étang de Berre dans les Bouches-du-Rhône et l’étang de Biguglia, au sud de Bastia, en Haute-Corse.

On note une nette opposition entre les masses d’eau côtières et les lagunes sur le littoral méditerranéen. Les premières sont toutes dans un bon ou un très bon état concernant l’élément de qualité « phytoplancton », alors que de nombreuses lagunes sont dans un état médiocre ou mauvais pour ce paramètre.

Cas particulier du phytoplancton toxique

Parmi les espèces susceptibles de produire des toxines présentes de façon régulière sur le littoral métropolitain, trois taxons jouent un rôle particulièrement important, car ils sont à l’origine des contaminations observées de façon récurrente tous les ans dans les coquillages pouvant conduire à des interdictions de consommation.

Il s’agit de Dinophysis (toxines diarrhéiques ou DSP), Alexandrium (toxines paralysantes ou PSP), et Pseudo-nitzschia (toxines amnésiantes ou ASP). Chacun de ces taxons est constitué de plusieurs espèces, plus ou moins toxiques.

L’analyse des données sur ces trois taxons toxiques révèle des schémas très différents concernant leurs répartition spatiale et temporelle et les concentrations maximales observées.

Dinophysis est observé tous les ans en baie de Seine et dans le Calvados à partir de juillet-août, en Bretagne ouest et sud à partir de mars-avril, et dans les lagunes du Languedoc-Roussillon et de Corse toute l’année. Il est plus rarement observé sur la côte nord de la France, dans l’ouest Cotentin, en Bretagne nord. Les maxima annuels sont presque toujours inférieurs à 10 000 cellules par litre, dans toutes les régions.

Alexandrium est observé tous les ans sur tout le littoral métropolitain, principalement en été en Manche – mer du Nord et en Atlantique, et en automne-hiver en Méditerranée. Les maxima annuels sont généralement inférieurs à 100 000 cellules par litre, à l’exception de quelques régions pour lesquelles ils ont été plusieurs fois supérieurs : Rance et baie de Morlaix en Bretagne nord, au large de la Loire, et dans l’étang de Thau dans le Languedoc.

Pseudo-nitzschia est observé tous les ans sur tout le littoral métropolitain, en concentrations importantes, avec des maxima annuels toujours supérieurs à 100 000 cellules par litre, et souvent supérieurs à un million. Les périodes de blooms sont principalement entre avril et juin dans toutes les régions.

En savoir plus...

Le phytoplancton, prolifération et impacts

Le phytoplancton est à la base des chaines alimentaires en domaine marin. Sa production dépend de nombreux paramètres comme les quantités de nutriments disponibles, l’éclairement, la température, les courants…

Les développements importants de phytoplancton (bloom) se produisent souvent au débouché des fleuves ou dans les lagunes, où les conditions sont optimales. On dénombre jusqu’à plusieurs millions de cellules d’une même espèce par litre d’eau.

Les blooms peuvent avoir des impacts plus ou moins importants sur le milieu naturel ou l’homme. Certaines proliférations provoquent uniquement la coloration des eaux du fait de la présence de pigments chez plusieurs espèces. Dans les cas les plus graves, la dégradation de l’excès de matière organique produite implique une importante consommation d’oxygène et l’asphyxie de la zone concernée.

Par ailleurs, la prolifération de phytoplancton peut modifier l’équilibre de la flore en faveur d’espèces libérant des toxines. Elles peuvent être néfastes pour la faune mais aussi pour l’homme, s’il consomme des coquillages infectés, les coquillages se nourrissant surtout de phytoplancton.

Auteur : Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer).

Ressources

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